La maison du pays d'Auray porte le nom du Roi Stevan (ti er roué Stevan, en référence à un prophète mendiant qui vécut en pays vannetais au siècle des lumières, et qui marqua profondément la mémoire de ce pays. L'association Ram'Dam assure son animation, par des actions de collectage, mais aussi en suscitant des rencontres lors de manifestations comme les quartiers de lune. 

 

Chronique des murets de Pierre
Suhun ketañ a dilost-hañv
Première semaine de l'automne
21 - 28 septembre 2002

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L'automne arrive...
Les hirondelles s'en vont


 La Trinité : les anciennes salines de Kervilaine.

En me promenant sur le sentier côtier qui va de Kerbihan à Kervilaine à la Trinité-sur-Mer, j'ai pu observer les dernières poursuivant leur entraînement, tirant quelques bords avant de s'élancer un peu inquiètes dans cette annuelle épopée transatlantique : «Ô, combien de marins, combien d'hirondelles qui sont partis joyeux pour ces courses lointaines...»

Il n'y a d'ailleurs pas qu'elles qui à  défaut de nous annoncer le début de l'automne nous annonçait surtout la fuite discrète de l'été : les petites brumes matinales  donnaient désormais à la rosée un aspect plus tenace, plus glacé, annonciateur des premières gelées... le soir, au crépuscule, le chant des rouge-gorges et des merles témoignait d'une certaine fébrilité  et leurs «clic-clic» inquiets n'avait plus rien à voir avec les gazouillis des chaudes soirées.


L'automne dans les champs bretons, tableau de Lucien Pouédras

Du côté de Men-Hallen, j'ai même vu les premiers cyclamens sauvages. Ces petites fleurs, telles de petites violettes à la robe parme, ont une drôle de réputation... du moins leurs cousines domestiques... peut-être parce qu'elles fleurissent à l'approche de la toussaint : on dit que, si on en offre un plant à une personne malade, la fleur s'épanouira ou dépérira selon les évolutions de l'état de santé de la personne.

J'ai toujours aimé cette saison, surtout lorsque le soleil refuse de se voiler. La campagne prend alors des couleurs mordorée et met en évidence la couleur des pommes. Depuis leur fleuraison au printemps, ces arbres fruitiers s'étaient faits très discrets durant l'été. Seul, l'automne savait les mettre en valeur, apportant des touches colorées au tableau de la nature. C'est ainsi que l'on peut redécouvrir dans les landiers ou parmi l'épine noire, ces pommiers sauvages qui font le bonheur de nuées de merles, de grives et de sansonnets.

Mais il n'y a pas que les passereaux qui profitent de cette fabuleuse manne : de délicieuses effluves s'échappent des maisons. Je me prendrais volontiers pour Marcel Proust.  Mais ce n'est pas l'odeur de la Madeleine qui, à cette saison, m'inspire... c'est l'odeur de la pomme cuite : Crumble, far aux pommes, compote maison, boudin aux pommes... en cette arrière-saison, elle est le fruit roi.

Rien pour moi n'égalera le plat de pommes cuites que ma grand-mère, Eugénie Le Maguer, du Vamen en Plouhinec, préparait chaque jour dès la fin du mois d'août. La recette était simple : un petit plat émaillé emplis de pommes ramassées sous l'arbre (les meilleures étaient les «mouj-moén», littéralement «les museaux fins», une espèce dont je ne chercherai même pas le nom savant), un verre d'eau pour que çà ne colle pas trop, un peu de sucre en poudre... elle glissait ce plat au fourneau et je ne sais trop si ce que j'appréciais le plus était la saveur ou l'odeur de ce plat. Sans doute était-ce le tout : une odeur de fruits cuits un brin caramélisé ou se mêlaient des senteurs de bois, de résine, de boules et d'aiguilles de pin.