|
<< Page de la semaine >> Les pompiers sont passés avec le calendrier. C'est aussi une coutume en fin d'année et la Sainte Barbe approche. «Sainte Barbe
et Sainte Fleur, C'est la prière qu'il faut réciter quand l'orage gronde et c'est ma grand-mère qui me l'apprise. Ma mère la récite à chaque fois : en tous les cas, çà marche car la foudre ne nous est jamais tombée sur le paletot. En tout cas, il est loin le temps des tournées magistrales de calendriers qui a forgé à nos braves sapeurs, une solide réputation de fêtards. De toute façon, mieux «fêtards» que jamais ! Entre le feu, l'eau et la boue, le mazout et les coups de tabac, on ne peut pas dire qu'ils sont toujours à la noce et il y a les risques du métier. Cette semaine, cinq d'entre eux ont été tués dans la Drôme. Un furieux du volant les a percutés en pleine intervention. Ils étaient tous du même village, un petit village où tout s'est écroulé comme les tours du World Trade Center. Pensez donc : près du quart de l'effectif. Et comme partout, ces volontaires, on devait les retrouver aux quatre coins de la commune : des écoles aux associations, de l'équipe de foot au téléthon. Entre révolte et chagrin, ce drame en a bouleversé plus d'un : il est vrai, et peut-être d'avantage encore dans les petites communes, que le corps des sapeurs pompiers est un des éléments clé de la vie communautaire villageoise. Lors des grands feux de Brec'h en 1984, quand les hauts de Saint-Guérin et de Saint-Dégan avaient brûlé, deux volontaires de Plescop avaient péri dans un accident de la route. Appelé en renfort, leur véhicule tout-terrain s'était reversé et les avait écrasés du côté de Mériadec. Qui s'en souvient encore ? Depuis, la lande a repoussé et les sapins aussi, «plus drus encore». Les bois ne sont que rarement entretenus de nos jours. Il n'y a plus de coupeurs de landes ni de ramasseurs de «dil», les aiguilles de pins. Un autre printemps, un autre été sec et tout repartira en fumée. les gens diront que «çà fait du nettoyage, que çà tue la vermine». c'est ainsi, c'est la vie.
«Et les mois noirs arriveront», toujours la même chanson ! Il y en a un que l'on ne verra plus passer ventre à terre au volant de sa deux-pattes. Jean-Paul, de Coët Digo, a décidé de raccrocher son cuir et son casque. Plein les bottes de ces sonneries de bip au cœur de la nuit. Saint-Anne ou Sainte-Barbe ne l'auront certainement pas perdu de vue durant ses quinze ans d'apostolat en tant que sergent volontaire. Pensez donc : pour rejoindre la caserne, c'était le parcours du combattant et pourtant, il n'aura écrabouillé aucun pèlerin sur les passages cloutés de Sainte-Anne. Pas un seul contrôle radar entre les Quatre-Cheminées et la Croix-Percée à Pluneret ! Aucun virage de raté dans le bourg : il aurait pu finir dans le pétrin de notre boulanger local. Il y avait un bon Dieu pour notre héros. La route du pape lui aura, dans ses dernières années de mission, permis de gagner quelques minutes pour sauter dans son camion. Il aura ainsi connu l'ouragan de 87, les inondations de 88, les feux de Brocéliande et du Val sans retour, la marée noire de l'Erika, l'arrivage des détonateurs sur nos plages, et le petit train-train quotidien des petits bobos et des grands drames de la vie courante.
Il rejoint désormais l'effectif des anciens. Ils ont d'ailleurs fait le tour de la ville d'Auray l'autre après-midi, toutes sirènes hurlantes, dans un vieux camions restauré. Des gamins qu'on aurait dit : Marcel Cloërec, Etienne Le Barh, Rémi Le Cam, Jean Kerguen, Jean Livec, Alain Le Port. Ils se croyaient en 76 . Respect et chapeau bas. Merci les gars !
|
|||||