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Lors de la sortie du premier cédé du groupe Spontus, la soirée fut très chaude à Plescop. C'était il y a quelques années et le lendemain fut terrible. Alors que la maisonnée s'enfonçait dans une réparatrice ronflette à l'heure où blanchit la campagne... nous fûmes brutalement et sans vergogne, mis au pied du lit par un ouvrier à pied d'œuvre de bon matin et au pied du mur, un marteau-piqueur à la main. Le brave type entamait, un samedi matin, les travaux de construction de la salle de musique familiale : on ne pouvait donc lui en vouloir. Imaginez la scène : la tête enfarinée où déjà, sans marteau-piqueur, les hémisphères cérébraux enfumés s'entrechoquaient, quelle ne fut notre stupeur, abasourdis que nous fûmes, d'être ainsi réveillés par ce pétaradant réveil-matin ! Vous comprendrez donc notre crainte : la sortie du cédé n°2 allait-elle être aussi terrible ? Ce fut d'un autre style mais que la fête fut belle ! La salle Marie-Josèphe Le Borgne accoucha d'une magnifique soirée. Tout le gratin de la jeune musique bretonne s'y était rassemblé.
1.300 personnes ont dansé jusqu'à une heure tardive et nous nous devons de rendre hommage à la fine équipe qui a du passer la serpillière. Je ne comprends pas, moi, quand on me paye un coup, je m'accroche à mon verre et je n'en perd pas une goutte. Il est vrai que la colossale affluence au bar avait dû soulever quelques remous. Il est vrai que ce nouveau disque se devait d'être fêté ; L'équipe d'An-Naër Production était aux anges : les ventes allaient grimper au plafond à la vitesse où Jean-Yves avait dégringolé l'escalier. L'inter-génération avait fonctionné et le cédé venait d'être primé : Kañnerion et Spontus se voyaient remettre deux jours auparavant le fameux «Priziou», l'oscar du meilleur cédé.
Seul un tel plateau pouvait d'ailleurs inciter les aficionados à sortir. Il faisait, une fois de plus, un temps de chien. Pluie et tempête balayaient le pays : il paraît que c'est bon pour le teint et que cela vaut toutes les thalassos du monde. Ce soir là, deux amis passaient par là et par je ne sais quel heureux hasard. Ce fut pour eux une découverte car dans leur Drôme ou Bordelais natal, le fest-noz n'existe pas. Seuls les Tri-Yann et autres Tri-Martelod (plus forcément yaouank) semblent vouloir imposer une sorte de modèle culturel breton. C'est bien beau, c'est bien joli mais c'est un peu comme le concours Eurovision de la chanson... Nos deux étrangers se sont donc aussi spontusément que spontanément intégrés à la populace locale et ont virevolté à qui mieux-mieux toute la soirée. Gavottes, kas-abarh, Telenn-du et danse du balai n'ont plus de secret pour eux. Ils m'ont quand même confié un petit truc avant de nous quitter : «Qu'est ce que les bretons sont sérieux quand ils dansent... on dirait des militants qui manifestent ! Pourquoi ils rigolent pas les danseurs ?». Après tout, ils n'ont peut-être pas tort. On se l'entend dire régulièrement et c'est peut-être une petite touche «rigolote» qui manque à la pratique du breton. A quand une démarche militante et marrante ? Ne manque t'il pas un brin de désinvolture pour que la langue perdure ?
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