La maison du pays d'Auray porte le nom du Roi Stevan (ti er roué Stevan, en référence à un prophète mendiant qui vécut en pays vannetais au siècle des lumières, et qui marqua profondément la mémoire de ce pays. L'association Ram'Dam assure son animation, par des actions de collectage, mais aussi en suscitant des rencontres lors de manifestations comme les quartiers de lune. 

 

Chronique des murets de Pierre
Eilved suhun a gouiañv
Deuxième semaine de l'hiver
26 - 31
décembre 2002

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La vieille semaine et la prévision du temps
(par Georges Le Callonec)

Le père Grégoire, de Rostrenen, signale, dans son dictionnaire, une croyance populaire selon laquelle on avait coutume de pronostiquer mois par mois en Bretagne, le temps qu'il ferait l'année entière.

Les 12 premiers jours de janvier, écrit-il, se nomment «ar gourdéziou», sur l'opinion qu'a le peuple que la qualité de ces 12 premiers jours de l'an dénote celle des 12 mois. Ce sont des jours présages.

M. Vallée, de Saint-Brieuc, déclare que cette tradition ancienne existe toujours en Cornouaille. Seulement, ce ne sont plus les douze premiers jours qui servent de pronostics mais bien les 6 derniers jours de décembre et les 6 premiers jours de janvier. Ces jours présages portent en Haute-Cornouaille le nom de «titennaou». Quant au mot «gourdeto», il est toujours en usage du moins dans le Goëlo, mais s'il faut en croire le savant folkloriste, il y désigne les jours complémentaires de la gestation d'un animal. Nous avons constaté à notre tour, la même croyance dans le pays de Vannes, mais avec une variante caractéristique. Au lieu de 12 jours, ici on n'observe que six. Un laboureur de Mendon nous en a parlé à peu près dans les termes. «La dernière semaine de l'année se nomme chez nous er spierézien ou er goh suhun». Les anciens l'observaient avec la plus grande attention car on croyait communément que les 6 derniers jours de l'année renfermaient le pronostic exact qu'il ferait l'année suivante et ils en tenaient soigneusement compte pour leurs travaux et leurs récoltes.

Pour reconnaître le temps à l'avance, par ce moyen, on divisait le jour en quartiers comme on divise encore le mois lunaire et à chacun de ces 24 quarts de jour (6x4), devait correspondre une période de 15 jours de l'année suivante. Par exemple si le premier quartier du 26 décembre était humide (de 6h à 9h du matin), il devait pleuvoir pendant la première quinzaine de janvier etc.

Les gens ne se résignaient pas à croire que la pluie et le beau temps fussent livrés au hasard et que la Providence ne leur eût pas donné à eux mêmes des points de repère pour se renseigner à l'avance.


Les saisons par Lucien Pouédras

M. Loth a publié dans la Revue Celtique, une étude sur ces gourdéziou en comparant la croyance bretonne avec des traditions équivalentes recueillies chez les allemands et chez les hindous.

Ces 12 jours, dit-il (du 25 décembre au 6 janvier, ce qui représente la tradition la plus ancienne), sont identiques aux fameux zwölften des allemands qui vont également du 25 décembre au 6 janvier. Depuis longtemps, on avait déjà rapporté les zwölften allemands des 12 jours sacrés des Hindous et les voici découverts aussi chez les Celtes. Je suis d'avis que nous avons affaire ici à une tradition indo-européenne ; l'année solaire a dû être connue des peuples indo-européens suivant toute apparence, par les babyloniens et je vois dans ces jours supplémentaires un effort pour accommoder l'année lunaire indo-européenne de 354 jours à l'année solaire de 366 jours (ce qui exige précisément un supplément de 12 jours).

Quoi qu'il en soit de l'hypothèse de M. Loth et elle nous paraît très vraisemblable, il est curieux de constater comment cette appellation, purement astronomique, a persisté ainsi à travers tant de siècles, mais en se transformant et en est arrivée, en tombant dans le domaine populaire, à n'avoir plus qu'une signification météorologique pour la prévision du temps.

En Vannetais, les 12 jours supplémentaires se sont réduits de moitié, à une semaine unique qu'on nomme la vieille semaine or il faut que celle-ci (c'est le peuple qui le dit avant de clore l'année définitivement) donne pour l'année qui va suivre des indications précises et précieuses ; de là son nom de spierezen - c'est à dire celle qui observe, ou plutôt celle qu'il faut bien observer.


Ce texte nous a été transmis par Georges Le Callonec, de Pluneret. Georges fait partie de ces passionnés d'histoire, de ces rats de bibliothèques qui hantent les salles des archives départementales de Vannes.


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