La maison du pays d'Auray porte le nom du Roi Stevan (ti er roué Stevan, en référence à un prophète mendiant qui vécut en pays vannetais au siècle des lumières, et qui marqua profondément la mémoire de ce pays. L'association Ram'Dam assure son animation, par des actions de collectage, mais aussi en suscitant des rencontres lors de manifestations comme les quartiers de lune. 

 

Chronique des murets de Pierre
Tèrved suhun hañveg
Troisième semaine de l'été
5 - 12 juillet 2002

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 Heol gwenn a ro glao
Hag heol ruz amzer vrao

Soleil blanc donne de la pluie
Et soleil rouge du beau temps

.Coucher de soleil à Saint-Cado.

En tout cas, on aimerait bien le voir ce sacré soleil rouge car le début de la saison est encore marqué par le mauvais temps et il n’y a pas que les touristes qui sont mécontents. Les gens deviennent ronchons et se plaignent «qu’il n’y a plus de saisons». c’est drôle mais c’est tout le temps comme çà : tout le monde râle. Pourtant, en 1891 déjà, l’abbé Guilloux qui effectuait un collectage sur le Roi Stevan auprès de vieillards de la région de Brandivy, notait que ceux-ci se plaignaient qu’il n’y avait plus de saisons et que c’était certainement le signe que la fin du monde était proche. On peut donc s’apercevoir que les préoccupations climatiques étaient déjà les mêmes et qu’après tout, le monde ne va peut-être pas si mal que cela. Après tout, on veut toujours nous faire croire qu’autrefois tout était bien mieux et que le cycle des saisons s’égrenait comme une horloge bien huilée. En fait, c’était comme maintenant : les bonnes et les mauvaises années se succédaient dans une certaine monotonie d’où seules émergeaient les périodes d’opulence, de disette, de temps pourri ou de sécheresse... les années exceptionnelles en quelque sorte. Même les gars de la météo sont d’accord avec moi mais lorsque j’essaie d’expliquer çà, on me dit que je n’ai pas raison. Moi je crois surtout que les êtres humains sont des grognons et que de toute façon, ils sont comme le temps... parfois bons, parfois mauvais et on ne pourra pas les changer.

Les foins, par Lucien Pouédras

 En tout cas, le foin a du mal à sécher et on risque encore d’avoir des feux de ferme à cause de la fermentation. Le foin humide fermente et chauffe au point de provoquer une auto-ignition. Marcel Cloérec, un ancien pompier me parlait de çà l’autre jour : tous les ans, à pareille époque, vers le 14 juillet, il y avait un grenier ou un hangar qui flambait dans la région. Il paraît même que certains faisaient exprès de tasser du foin vert dans les greniers pour les assurances, mais tout çà c’est des «on-dit». Il n’empêche...

La nature est verte comme au mois de mai. Depuis une quinzaine de jours, les châtaigniers sont en fleurs. On le remarque surtout dès qu’il y a un rayon de soleil : les arbres ventrus prennent alors une nuance d’un joli blond. Quand on était petits, on s’amusait à fumer ces fleurs qu’on appelait chatons et qui brunissaient comme du tabac avec les chaleurs de l’été. Deux ou trois fleurs roulées dans un bout de papier journal... juste la longueur d’une clope ...rien de tel pour une bonne quinte de tous. C’est ainsi que l’on devient des hommes. Avec un bon verre de vin de mûres, en fait des mûres écrabouillées dans de l’eau et mise dans une bouteille de gros rouge étoilée... notre éducation de petits hommes des bois était parfaite. «Du vin et du tabac, tout un programme» Les ronces sont d’ailleurs en fleurs, d’un blanc rosé pâlichon et les fruits commencent à se former.

Dessin de Lucien Pouédras

Les bruyères aussi, celles d’été commencent à former de jolis tapis. J’ai cependant été surpris de voir des talus complètement grillés, dignes du fameux été 1976. C’était du côté du Pont-Neuf entre Saint-Anne et Pluvigner. La couleur paillasson tranchait odieusement avec le vert écrasant de notre début d’été pluvieux. Je ne sais pas si le cultivateur a bien calculé son dosage mais en tout cas, il a été efficace. On dirait qu’Attila est passé par là...

C’est pas pour critiquer, dame ! c’est juste pour dire. Le Roi Stevan avait bien dit :«Un temps viendra où les savants seraient des empoisonneurs publics». Mais, il faut bien vivre avec son temps !

Dessin de Lucien Pouédras

C’est comme à Pluneret l’autre jour, au ruisseau de Lanriacq. En septembre dernier, j’y avais trouvé des anguilles et toute une flopée de petits poissons qui flottaient le ventre en l’air, dans un joli bain moussant. Le gars de la commune m’avait dit qu’il y avait dû y avoir une pollution. Cette semaine, la bonne nouvelle, c’est que les petits poissons sont revenus, mais la mauvaise, c’est qu’ils ont bétonné une partie du ruisseau : le menu fretin fait désormais des longueurs dans une canalisation en béton. Avec le carrelage en plus, ils pourraient se croire à Center-Parc. Il paraît que c’est pour que l’eau s’écoule mieux. Quand je pense qu’au Pont-Christ, les gars de la Gaule Alréenne et les volontaires d’Eau et Rivières sont en train de se crever le derrière à refaire les berges...

Je répète : c’est pas pour critiquer... c’est juste pour dire !

En arrivant à Pluvigner, j’ai été voir les gars de Spontus. Ils sont en train d’enregistrer un disque avec les Kannerion. Au boulot qu’ils sont, depuis dix jours... et même dix nuits. Il paraît que les chanteurs de Pluvigner n’étaient pas trop en forme l’autre mardi. Sensément qu’ils auraient fait la java en Slovaquie : ils n’avaient plus de voix et il a fallu recommencer le lendemain. On dit bien les jeunes mais... Je me demande si les vieux ne sont pas pires. Le seul qui est resté travailler au pays, sans doute le plus sérieux de la bande, c’est Bruno Le Berre de Dudy en Plumergat : lui, s’il a eu du mal à chanter son solo, c’est parce qu’il avait trop crié sur ses chevaux... Tu parles d’une équipe.

Le groupe Spontus l'hiver dernier salle Emeraude à Locoal-Mendon.

C’est Audrey Le Jossec qui leur a fait la cuisine pendant tout ce temps. C’est une fille de Mériadec qui joue très bien de l’accordéon diatonique. Elle animait la-bas dimanche dernier pour la fête du cercle celtique avec le groupe Imosima : çà veut dire «c’est comme çà» en breton phonétique du côté de Plouhinec. C’est Monsieur le recteur qui leur a prêté une petite maison pour faire la popotte.